lundi 9 février 2009

Inventaire des mesures concernant les écoles élémentaires et maternelles

Si ça peut contribuer à la rédaction envisagée, ci-dessous le manifeste élaboré par un collectif du bas-Rhin très actif, diffusé prochainement lors d'une conférence de presse:


MANIFESTE DU COLLECTIF

SAUVONS L'ECOLE POUR TOUS - 67

Nous, citoyens, parents, enseignants, élus, réunis au sein du collectif SAUVONS L'ECOLE POUR TOUS, déclarons être fondamentalement attachés à une école publique, gratuite, laïque, égalitaire et émancipatrice.

Ces valeurs sont actuellement en danger.*

Nous nous engageons de ce fait à exercer une vigilance républicaine pour les préserver.

Nous affirmons notre indépendance vis-à-vis de toute organisation politique ou syndicale.

Nous mettrons en œuvre tous les moyens autorisés par la loi pour

- informer les citoyens,

- manifester nos désaccords,

- interpeler les élus,

- exiger que l'avenir de l'école fasse l'objet d'un débat démocratique avec les différents acteurs de l'école, usagers et professionnels.

(*) Voir document annexe :

Inventaire des mesures concernant les écoles élémentaires et maternelles.

Inventaire des mesures concernant les écoles élémentaires et maternelles

(appliquées ou en projet…)

Notre mouvement est né à partir des inquiétudes qu'ont suscitées les mesures prises par l'actuel Ministre de l'Education Nationale au niveau des écoles maternelles, élémentaires. Leurs conséquences seront irréversibles quant à la nature même de l'école de la République :

Après plusieurs dizaines de milliers de suppressions de postes d'enseignants depuis 2003, le gouvernement en annonce à nouveau 13500 pour la rentrée 2009. Qui peut imaginer que cela n'aura pas d'incidences sur le nombre d'élèves par classe et sur le fonctionnement pédagogique ?

Un enseignant doit se former tout au long de sa carrière et le corps enseignant est majoritairement composé de femmes. Il est donc impossible d'assurer la continuité du service public d'éducation sans un nombre suffisant de personnels spécialisés appelés titulaires mobiles. Ces collègues sont capables de remplacer n'importe quel maître à tout moment et n'importe où. Or, il arrive de plus en plus souvent que des classes restent sans maître car il n'y a pas de titulaire mobile disponible. D'autre part, le recrutement a fortement baissé cette année alors que le nombre d'enfants à scolariser ne varie que dans une faible proportion. Nous sommes bien confrontés à une logique de gestion des postes à flux tendu, avec tous les blocages que cela implique.

La remise en cause des RASED et la sédentarisation de leurs enseignants spécialisés dans certaines écoles pose la question de l'abandon de la difficulté scolaire par le service public d'éducation. En effet, d'une part l'Aide Personnalisée ne peut résoudre les difficultés traitées par les équipes des RASED car les enseignants ordinaires, non formés, n'auront pas les moyens de prendre en charge les difficultés psychoaffectives, comportementales, de refus scolaire, etc. D'autre part, les écoles en milieu rural ne bénéficieront plus d'aucune aide spécialisée dans l'écoute, l'interface entre les parents, l'école et les partenaires extérieurs ( orthophonistes, CMP, ...) car les psychologues scolaires, seuls, ne suffiront pas à la tâche.

Le temps scolaire a encore été réduit de deux heures par semaine alors que personne ne demandait quoi que ce soit (1338 heures en 1894, 850 heures en 2008). Les rythmes scolaires auraient dû être réorganisés au lieu d'être réduits. Ils vont à l'encontre des recommandations de tous les experts de l'enfance. Les écoliers français ont le nombre de jours de classe le plus faible d'Europe, mais les journées les plus chargées, avec notamment des heures de soutien placées aux plus mauvais moments. (144 jours en France, 188 en Finlande, 190 en Grande-Bretagne, 200 en Italie et au Danemark, 210 au Japon). Au lieu d'une saine continuité, les élèves français doivent s'adonner à une succession de sprints, entrecoupés de période qui favorisent l'oubli.

ÄLes programmes scolaires ont été nettement alourdis en 2008. Ils sont à traiter dans un temps réduit. La tendance est à l'intensif au détriment de projets qui donnent du sens aux apprentissages. Ils instaurent l'apprentissage de la lecture dès la grande section de maternelle, à un âge où nombre d'enfants n'ont pas la maturité nécessaire. Ils mettent l'accent sur les « automatismes » plutôt que la recherche de sens. La démarche pédagogique recommandée est celle de la répétition, de l'exercice redoublé. Oui, mais quand ? Cela demande beaucoup de temps, si possible correctement ''fractionné''. Dès lors, à qui profiteront ces programmes ?

Après avoir discrédité l'école maternelle, le Ministre semble avoir fait marche arrière. Mais le projet de création de « jardins d'éveil » n'est pas abandonné pour autant et continue à remettre en cause le travail de l'école maternelle auprès des jeunes enfants au moment crucial de l'apprentissage du langage, déterminant pour la suite de leur scolarité.

Le risque de remplacement des enseignants absents par des vacataires pose les mêmes questions de formation et donc de professionnalisme de ces personnels.

La suppression des Instituts Universitaires de Formation des Maîtres remet en cause la formation initiale des professeurs des écoles et donc leur professionnalisme en matière de connaissance de l'enfant (développement, psychologie...) et de pédagogie (définition du Petit Larousse : « Science ou méthode d'éducation et d'instruction des enfants »).

L'accueil des enfants en situation de handicap à l'école. La loi du 11 février 2005 a constitué une forte avancée en affirmant le principe d'une scolarisation de l'enfant en situation de handicap en milieu ordinaire « si nécessaire au sein d'un dispositif adapté » (CLIS). Depuis, de nombreux jeunes, qui, auparavant auraient été inscrits en institut médico-pédagogique, sont accueillis à l'école. Cet effort a été accompli essentiellement par les équipes pédagogiques à moyens constants ou presque. Or, comment souhaiter un accueil réussi des enfants en situation de handicap sans mettre en œuvre les conditions nécessaires à leur accueil ?

La suppression de la carte scolaire, promise par le Président de la République, combinée avec la mise en concurrence des établissements, est une politique qui a déjà été appliquée dans d'autres pays. Elle s'est traduite partout par une fuite des familles favorisées vers les établissements les plus réputés et une concentration des familles les plus populaires ou immigrées. Les écoles moins cotées se sont vidées de leurs éléments moteurs. La plupart de ces pays remettent en place des systèmes de régulation (Belgique, Angleterre, Canada…).

L'examen du projet de loi sur les établissements publics d'enseignement primaire (EPEP), déposé par le député maire de Niederbronn est ajourné mais les EPEP restent un objectif du gouvernement.

Dans ce projet, les écoles comptant plus de 15 classes deviennent obligatoirement des EPEP. Sur demandes des communes ou des structures intercommunales, toute école de plus de 13 classes peut également devenir un EPEP, après accord de l'Inspecteur d'Académie. De même, sur demande de structures intercommunales, un regroupement de plusieurs écoles (minimum 13 classes) peut aussi obtenir ce statut. L'objectif affiché est de donner à ces établissements une autonomie de gestion.

Un EPEP est dirigé par un conseil d'administration composé de quatre élus, de quatre parents et de seulement trois enseignants. Cette instance est responsable de la gestion, mais définit également les orientations éducatives. Dans une telle configuration, le directeur d'école, interlocuteur privilégié des parents n'existe plus. L'école est découplée de l'Education Nationale et passe sous tutelle des autorités locales, avec le risque d'une accentuation des inégalités entre communes. Une telle mutation ne saurait se faire sans une véritable négociation avec les usagers et les professionnels.

Les évaluations CM2-CE1 :

La saisie des résultats des évaluations de CM2 a été effectuée dans des bases de données académiques qui n'ont pas été validées par la CNIL.

L'esprit et les mécanismes de ces évaluations laissent douter de leur utilité pédagogique. Elles ont supposé que toutes les notions d'un programme, qui n'est mis en œuvre que depuis 4 mois, devaient déjà être acquises à la mi-janvier. Certains exercices étaient difficiles, le temps laissé pour répondre était fortement contraint et le mode de correction (juste – faux) sanctionnait de la même façon l'élève qui avait 8 bonnes réponses sur 10 que celui qui n'en avait aucune. L'outil a donc artificiellement mis en difficulté bon nombre d'élèves.

Nous craignons à terme une dérive qui consisterait à publier un palmarès des écoles avec pour objectif la mise en concurrence des établissements, dans laquelle l'intérêt de l'enfant n'aurait que peu de place.

Les associations complémentaires de l'école qui, depuis des décennies, agissent pour ouvrir culturellement le champ de l'école (classes de découvertes, rencontres sportives, animations culturelles…) et aider les élèves les plus défavorisés, sont menacées de disparition par la réduction brutale de leurs moyens financiers et humains.

La mise en place d'une cellule de veille :
Le ministère de l'éducation nationale a lancé un appel d'offre vers des sociétés privées pour mettre en place par internet un dispositif de veille visant à repérer parmi ses personnels les leaders d'opinion, à analyser leur potentiel d'influence et leur capacité à se constituer en réseau.
Cet appel d'offre est disponible sur internet et la prestation a été financée à hauteur de 240 000 €.
Notre ministre ne comprend pas notre suspicion pour ce qui ne serait qu'un simple outil de gouvernance. Nous apprécions l'attention qu'il porte à nos avis et nous mettons à son entière disposition pour bâtir avec lui l'avenir de l'école.

La réduction drastique des moyens alloués à l'école publique s'accompagne, en parallèle, de mesures financières, sur fonds publics, toujours plus favorables aux établissements privés (qui ne sont pas soumis aux mêmes contraintes) : crédits d'impôts, projet de chèque-éducation, contrats d'associations, projet de loi pour obliger les communes à verser des frais de fonctionnement aux écoles privées accueillant leurs enfants, etc…

Les mesures actuelles du gouvernement nous inquiètent beaucoup. Elles sont déstabilisantes au moment où nous aurions besoin de confiance, sont prises unilatéralement alors que nous aurions besoin de dialogue et ne servent en rien l'intérêt des enfants.

Ne produisant aucune amélioration du fonctionnement de l'école, elles ne peuvent prétendre être des « réformes ».

Ces mesures, mais aussi les écrits ou propos tenus dans un passé récent par de nombreux hommes politiques actuellement au pouvoir, les accords sur la commercialisation des services, signés par la France dans le cadre de l'OMC, nous font craindre une vaste opération de déconstruction de l'école publique. Elle consisterait à dégrader fortement les conditions d'enseignement pour lui faire perdre toute attractivité au regard du privé. Ainsi, l'éducation pourrait devenir un service commercial, soumis aux intérêts du marché.

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